La motorisation, enjeu essentiel de la modernisation de l’agriculture
Afin de moderniser le secteur, les autorités de l’après-guerre, confortées par le Plan Marshall qui fournira à la France 48 000 tracteurs, plaident pour le développement du machinisme.
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Le 18 juin 1945, l’un des premiers numéros de La France Agricole consacre un gros dossier à l’industrie du machinisme agricole, précisant qu’avant la guerre, l’agriculture ne consacrait que 1 % de ses investissements à l’achat de matériel. Une situation qui sera aggravée par la Seconde guerre mondiale. D’où le retard par rapport aux pays voisins et la priorité accordée par l’équipe qui entoure Jean Monnet (embryon du Commissariat au Plan) au machinisme agricole.
Une des six priorités du Plan
Le référent agricole, l’agronome René Dumont (et futur candidat écologiste à la présidentielle de 1974), par ailleurs à l’époque collaborateur régulier du journal, réussit à placer le machinisme agricole parmi les six priorités du Plan. Le 22 mars 1946, la FA précise que le Conseil du Plan s’est fixé comme objectif la fourniture de 50 000 tracteurs par an pendant cinq ans. Quelques mois plus tard, un éditorialiste considère que le machinisme agricole est certes un facteur essentiel de la modernisation agricole mais pas le seul.
Dans ce contexte, le Plan Marshall d’aide américaine aux économies européennes va conforter les objectifs du Plan Monnet. Et le 19 janvier 1948, la FA est présente quand la France reçoit les 209 premiers tracteurs du Plan Marshall. « Les Français ne mesurent pas encore ce que nous devons à l’aide américaine », souligne Pierre Pfimlin, le ministre français de l’Agriculture, qui précise l’immensité des ressources (de l’ordre de 400 millions de dollars de l’époque pour l’agriculture, sous forme d’un tiers de prêts et de deux tiers de dons) mises à la disposition de la France.
« Le meilleur mais peut-être aussi le pire »
Plus anecdotique, le 23 avril 1948, la FA rend compte de la démonstration de jeeps issues des surplus de l’armée américaine sur le domaine de l’école de Grignon. Le 16 juillet 1948 le chroniqueur de la FA, Georges Breat nuance l’enthousiasme autour du plan Marshall, considérant qu’il « contient le meilleur mais peut-être aussi le pire ». Il s’inquiète notamment que le niveau de vie des Français soit dépendant de l’aide américaine et craint que la préférence donnée à l’envoi de denrées et d’articles de consommation sur les biens d’équipement ne compromette le relèvement du niveau de notre production.
Le 29 octobre 1948, le journal enquête sur l’adaptation de la motoculture française aux petites et moyennes exploitations. La France compte alors 2 millions d’exploitations de moins de 20 hectares, 385 000 de 20 à 50 hectares, 79 400 de 50 à 100 hectares et 27 500 exploitations de plus de 100 hectares et beaucoup d’agriculteurs, faute d’argent, constate l’article, ne peuvent acquérir le tracteur dont ils auraient besoin, d’autant que le prix du carburant est 5 fois plus élevé qu’aux États-Unis. D’ailleurs le cheval de trait résiste, comme le montre un article du 25 novembre 1949. Puis tout s’accélère. En 1956, 400 000 tracteurs, dont 48 000 importés dans le cadre du plan Marshall, remplaceront l’énergie animale.
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